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Avventure dell�autorit�, Studi francesi, n� 149, maggio-agosto 2006

La revue italienne Studi francesi a consacr� l�un de ses num�ros sp�ciaux aux Avventure dell�autorit� (Avatars de l�autorit�). Elle accueille ainsi les contributions du troisi�me volet d�un s�minaire organis� par l�Universit� de Turin, avec la collaboration de Simone Messina de l�Universit� Lyon II, consacr� aux Metamorfosi dei Lumi (M�tamorphoses des Lumi�res). Les deux premiers volets avaient pour titre  : D�un si�cle � l�autre, le tournant des lumi�res (publi� dans le suppl�ment au n� 124 de la revue en 1998) et Esperienze dell�io e creazione letteraria tra Sette e Ottocento (Exp�riences du moi et cr�ation litt�raire entre les XVIIIe et XIXe si�cles). Ce troisi�me ensemble s�inscrit donc dans une plus vaste r�flexion portant sur �  l��laboration et la formulation d�une sorte de nouveau sch�ma historiographique destin� � couvrir l��poque allant du XVIIIe au XIXe si�cle, que les Fran�ais appellent d�j� tournant des Lumi�res, et � remplacer des d�finitions et cat�gories qui ne permettent plus d�sormais de fixer les caract�res saillants d�une saison culturelle, litt�raire et artistique sp�cifique  : qu�il s�agisse de celle d�un �  n�oclassicisme  � sans doute encore valable mais qui ne concerne qu�un espace litt�raire et artistique, voire le monde des m�urs, ou celle d�un �  pr�romantisme  � qui rel�gue les auteurs du temps au r�le r�ducteur de simples pr�curseurs d�une nouvelle p�riode de la culture europ�enne, ou encore de la d�finition d�un �  d�clin des Lumi�res  �, productive mais inappropri�e[�]  �. Car elle n�envisage pas assez le caract�re de �  permanence et de transmutation  � qui caract�rise le moment en risquant de privil�gier les �  ruptures brusques qui ne se produisent jamais de fait dans l�histoire de la culture  � et, par l�, d�en sous estimer les �  contradictions internes, les clairs-obscurs, les nuances et les passages progressifs  � (L. Sozzi, Presentazione, p. 223).

Le concept d�autorit� qui est au c�ur de ce troisi�me volet - aux approches � la fois interdisciplinaire et europ�enne-, se pr�te parfaitement � ce type de questionnement. Au premier abord, l�on pourrait penser que ces ann�es de R�volution ont contribu� � remettre en cause la vision autoritaire du monde fond�e sur le respect inconditionn� de ceux qui exercent un pouvoir absolu au sein de la soci�t� et de la famille, et ce, au profit de visions reposant sur la r�bellion et la d�sacralisation. Les articles recueillis dans ce volume attestent qu�il n�en est pas ainsi. Ils documentent une m�tamorphose du concept d�autorit�, plus encore que son renversement. Y sont interrog�s des textes dont on interroge surtout les h�sitations et les tensions, tant dans la repr�sentation fictionnelle que dans le discours programmatique de certains auteurs.

L�ensemble comprend deux parties : l�une envisage le th�me de l�autorit� dans le contexte familial, l�autre dans ses implications politiques. Dans la premi�re, Aim� Guedj examine la pi�ce Charles et Caroline de Pigault Lebrun, l�une de celle qui porte sur l�infraction (d�un fils) � l�autorit� (d�un p�re) en p�riode de r�volution. L�int�r�t de ce drame bourgeois r�siderait alors dans le fait qu�il est construit sur un double mouvement antagonique et compl�mentaire de promotion des valeurs d�mocratiques nouvelles (fond�es sur la raison, la nature) et de d�mystification des valeurs aristocratiques surann�es (appuy�es par une loi d�sormais peu repr�sentative des changements en cours). Dans la figure du p�re se heurtent ainsi l�image d�une ancienne relation de pouvoir, qui caract�rise le p�re d�Ancien R�gime, et celle d�un nouveau �  contrat moral  � qui r�gle les liens de famille  au tournant du si�cle (contrat fond� sur une correspondance entre tendresse des parents et pi�t� filiale) jusqu�� ce que ce dernier type de relation l�emporte � la fin de la pi�ce gr�ce � des �v�nements et personnages marqu�s qui permettent tant l�affirmation de la vertu et le d�voilement de la v�rit� que la conversion du p�re et la r�solution pacifique du conflit. Et ce, sans doute, malgr� les intentions de Pigault Lebrun, plus nuanc� dans ses romans que dans des drames aux implications civiles tranch�es. L�examen d�Adolphe par Valentina Pozzetto montre que le roman est con�u comme une remise en cause des principes libertins v�hicul�s par le p�re du h�ros, auxquels le fils n�arrive plus � souscrire. Ce qui, � un autre niveau, est accompagn� du renversement des topoi et de la structure du roman libertin du XVIIIe (relation guide d�sabus� � disciple na�f, exp�rience de l�amour toujours ma�tris�e, modalit�s th��trales et sadiques de la rupture avec la femme). Dans son analyse du r�pertoire De l�Influence des femmes sur la litt�rature fran�aise de Mme de Genlis, Carmela Ferrandes s�interroge quant � elle sur la nature de l�autorit� litt�raire des femmes examin�es dans le texte pour souligner qu�elle investit plut�t leur r�le de promotrice que celui d�auteur. Et quand bien m�me la femme arriverait � changer de statut, comme cela se produit dans le cas de Mme de Genlis auteur de roman, elle ne serait qu�un �  auteur- femme au foyer  � parlant au c�ur. Y serait donc ni� en quelque sorte le principe m�me d�autorit� � la faveur de celui de subordination, hypoth�se confirm�e par l�analyse de deux romans de Mme Cottin et, par opposition, de S�nac de Meilhan  : si celui-ci th�orise l�irruption du romanesque dans l�histoire avec la r�volution, les �crivaines de la Contre-r�volution privatisent celle-l� en aplatissant les �v�nements sur les sentiments en des termes qui confirment les �nonc�s �  scientifiques  � de Cabanis sur l�inf�riorit� de la femme dans les mati�res litt�raires. Atala est au c�ur de l�examen de Valeria Ramacciotti. Elle y d�c�le plusieurs niveaux d�autorit�. D�abord, � l�ext�rieur du texte,  elle envisage l�autorit� litt�raire de Chateaubriand tout le long du si�cle en particulier � partir de ce �  texte-pivot  � qu�il qualifie lui-m�me de �  production d�un genre inconnu  � en h�sitant, pour le d�finir, entre �  Gorgone ou V�nus  �, monstruosit� et beaut�  elle signale aussi le rapport ambivalent de l��crivain avec l�auctoritas de Voltaire ou Rousseau  . Ensuite, � l�int�rieur du texte  , elle aborde le sujet d�un point de vue th�matique  : s�y �  croisent et se superposent  � diff�rents types d�autorit�, familiale d�abord (effacement progressif de la figure du p�re � la faveur de figures de substitution, pr�sence de plus en plus forte de celle de la m�re, diff�remment v�cue par Chactas et Atala, celle-ci devenant pour Chactas une figure de substitution)  ensuite autorit� politique et religieuse du p�re Aubry, reconnue par Chactas, mais moins forte que celle du principe de patrie qui pr�vaut chez lui en ce qu�elle fait co�ncider autorit� au sein de la famille et autorit� politique en la personne du p�re effectif. Clara Leri se penche, quant � elle, sur les diff�rentes mani�res dont est pos� le probl�me de l�autorit� dans Les Fianc�s de Manzoni. Y alternent l�autorit� �  auctoriale  � et celle des personnages  ou encore une autorit� externe, d�rivant de l�histoire, et un conflit entre personnages fictionnels, autoritaires d�un c�t�, et victimes de l�autorit� de l�autre  alternent aussi diff�rentes formes d�autorit� fond�es sur la propri�t� ou sur l�honneur, voire sur des abus caract�riels. Leur remise en cause passe souvent par l�ironie qui touche les relations sociales qu�elle d�termine ou la non co�ncidence entre �  force l�gale  � appuy�e sur la violence et �  force r�elle  � chez certains de ses repr�sentants. Elle passe aussi par l�importance accord�e au conflit int�rieur de certains personnages pour qui le r�gime faussement moral de l�autorit�, et son corollaire rh�torique et verbal encore plus pernicieux en ce qu�il favorise une adh�sion de la part de celui qui la subit, ne peut aller de pair avec le libre arbitre de la victime, en particulier dans le domaine familial (dans les rapports p�re et enfant) ou religieux. Dans son analyse de Mansfield Park de Jane Austen, Giuliana Ferreccio souligne une remise en cause analogue. Elle part de l�examen des rapports complexes et toujours plus conflictuels qu�entretiennent � l��poque property et propriety dans les familles anglaises de l�aristocratie. Quoique dominant dans l�ensemble des romans de l�auteur, ce th�me subit une transformation dans l�ouvrage analys�. S�y opposent en effet la property (les mani�res et la vertu de l�h�ro�ne, orpheline sans propri�t�s) et l�absence de telles qualit�s chez celui qui incarne l�autorit� paternelle et la propriety, personnage dont le paternalisme cache une rigidit� mentale sourde aux changements de mentalit�. Mais l�int�r�t du texte est aussi de repr�senter le conflit � partir du point de vue de la victime dans une sorte de �  monologue narr�  � o� alternent diff�rentes formes de prise de distance de la part du sujet de l��nonciation. Si ce proc�d� permet de d�noncer de mani�re efficace et indirecte l�inad�quation entre un langage et un agir en mati�re d�autorit�, il permet aussi de souligner l�impossibilit� pour la victime de devenir agent de sa propre histoire en prenant la parole ou en r�agissant � son sort. Elle n�est alors que le th��tre des contradictions de son temps repr�sent�es sur la sc�ne de sa conscience.

La deuxi�me partie de l�ensemble est consacr�e aux rapports qu�entretient L�Autorit� avec la politique. Dans le premier article, Domenico Felice rel�ve les nombreuses traces de l�autorit� de Montesquieu et en particulier de L�Esprit des lois dans les textes de deux hommes politiques et juristes italiens de tendance lib�rale  qui s�int�ressent aux fondements, � la nature et � l�exercice du pouvoir : Vincenzo Cuoco et Gian Domenico Romagnosi. N�anmoins, plus implicitement le premier et plus explicitement le second, ils en arrivent � contester l�ouvrage � la lumi�re de contre-mod�les. On voit ainsi que pour Cuoco, l�ouvrage en question est �  imparfait  �, qu�il manque d�id�es g�n�rales et de m�thode, est incoh�rent dans ses parties. Mais il regrette surtout que l�auteur ait ignor� �  le droit naturel  � ou �  jurisprudence universelle  � en se limitant � rechercher les �  diverses causes et les divers effets des changements et des diff�rences des lois  � sans remonter �  � la nature m�me de l�esprit humain et de la soci�t� civile  �, ce qu�en revanche a fait Vico, le philosophe napolitain consid�r� comme le �  vrai fondateur de la science de la l�gislation  �, auquel il attribue une primaut� chronologique et th�orique. Si, par contre, Romagnosi fait siennes certaines affirmations de l�auteur fran�ais dans son ouvrage, il refuse celles qui ont trait par exemple au fondement de la libert� du citoyen, au droit naturel, en prenant lui aussi Vico et parfois Charles Bonnet comme contre-mod�les. Dans son analyse d�un int�ressant article du Journal eccl�siastique de l�ancien j�suite Augustin Barruel, destin� aux clercs de 1789 et inspir� des principes de Bossuet, Luciano Guerci donne la parole � un auteur de la Contre-R�volution qui s�inscrit dans le d�bat de son temps, au moment o� les Etats G�n�raux peuvent encore � ses yeux sauver la paix fond�e sur �  la r�union de la force et de l�autorit�  �. Barruel entend ainsi redonner de la vigueur � un pouvoir menac�, d�fendre la monarchie absolue de droit divin. Il utilise pour ce faire un raisonnement bas� sur des principes et des vocables emprunt�s � ses adversaires, dont il renverse le sens pour mieux d�fendre sa th�se. Son discours, qui entend �  r�v�ler au peuple les suppositions fausses, les principes absurdes sur lesquels on pr�tend �tablir son bonheur, et les vraies cons�quences qui t�t ou tard ne peuvent qu�entra�ner sa ruine et celle de l��tat� s�articule ainsi autour de th�mes tels que la libert�, � ses yeux compatible avec la monarchie, la figure paternelle du souverain, vivant pour et non contre ses sujets, la distinction entre monarchie et despotisme, la nature divine de la royaut� et, chose surprenante, �  la constitution  � sur laquelle serait fond�e toute monarchie. Il remet alors en question �  les id�es fausses  � qui d�naturent le v�ritable sens des mots  : lumi�res, d�mocratie, peuple, plut�t identifi� � ses repr�sentants qu�� la multitude. Il attribue aussi au roi le m�rite d�avoir d�fendu ses sujets de l�arrogance de la noblesse et d�plore l�ingratitude du Tiers Etat  : �  l�ingrat affranchi qui de sa libert� se fait un premier titre contre son bienfaiteur  �, pour enfin pr�sager la catastrophe en cas de rupture entre le prince et ses sujets, au cas o� la loi du nombre arriverait � supplanter la loi d�un seul. Wilma Proglio souligne ensuite l�importance du th�me de l�autorit� politique dans trois trag�dies de Le Mierre. Elle y examine la violence de la patria potestas, fond�e sur la ruse et la pr�varication du souverain  : elles sont loin de surprendre de la part d�un �crivain qui s�inspire dans ses pi�ces des id�es des Lumi�res, quel que soit le sujet choisi (appartenant � histoire antique, aux l�gendes occidentales ou � l�exotisme). Elle voit dans la r�currence du th�me l�inqui�tude que suscitent chez l�auteur les tensions sociales dont elles sont le reflet. Claudia Corti se penche sur la repr�sentation de la R�volution fran�aise dans les th��tres anglais et sur la mani�re de poser les probl�mes d�autorit� politique. Elle rel�ve que, d�un c�t�, l��v�nement appara�t fr�quemment sur la sc�ne de th��tres mineurs, moins sujets � censure, dans des pi�ces � grand succ�s o� domine l��pisode de la prise de la Bastille, particuli�rement spectaculaire, et servant � mieux montrer la sup�riorit� du r�gime lib�ral anglais  de l�autre elle appara�t, moins fr�quemment, dans les th��tres officiels qui, pour la dire, ont besoin de recourir � des subterfuges pour cacher sa v�ritable nature, consid�r�e comme dangereuse pour toutes les monarchies. Elle est alors transport�e dans un autre contexte spatio-temporel,  ou ins�r�e � l�int�rieur d�une ballad opera consacr�e� aux Croisades, voire repr�sent�e dans une pantomime plus traditionnelle qui la d�pouille de son caract�re historique. Quant � la contre-r�volution, elle s�exprime surtout par le biais de la reprise de certaines trag�dies shakespeariennes, Henry V, Coriolan, Macbeth qui lui servent � r�futer � la fois une monarchie autoritaire et les id�es jacobines. Olivier Bara se penche sur l��dition pr�fac�e par Nodier du Th��tre choisi de Pix�r�court (1840), le p�re du m�lodrame r�gulier aux ambitions esth�tiques en m�me temps que morales puisqu�il a recours � certaines r�gles aristot�liciennes, � la vraisemblance et � un enseignement moral et marque un �  retour � un ordre politique et social r�gulier et la r�affirmation d�une Autorit�  �. On y lit ainsi un �loge de la paternit�, autorit� protectrice r�int�gr�e dans son droit et son honneur, et une condamnation de la tyrannie et du r�gicide, dans un m�lange de nouveaut� et d�uniformit�. Olivier Bara distingue n�anmoins le moment de la cr�ation des pi�ces de celui de leur publication, alors que les m�lodrames, affaiblis dans leur valeur normative, commencent � d�velopper des figures qui v�hiculent des ferments insurrectionnels sur le mod�le romantique et � perdre leur autorit� morale, au grand dam de Pix�r�court. Il proteste ainsi, dans sa postface, contre ce changement de valeur, r�cuse l�assimilation du m�lodrame au drame romantique, mauvais, dangereux car immoral, incapable de ce fait d�exercer une autorit� �thique sur la soci�t�, qualit� reconnue au contraire au premier m�lodrame qui avait drain� et transpos� la violence n�e de la r�volution sur le plan de la repr�sentation pour mieux la purger. Enfin, dans l�article de cl�ture, Lionello Sozzi s�interroge de mani�re plus g�n�rale sur l�autorit� de l�homme de lettres en partant de la comparaison �tablie par Voltaire dans son Dictionnaire philosophique  : un �  poisson volant  �, menac� par le haut et le bas de la soci�t� et pris entre les feux du servilisme et de la d�magogie. D�o� l�exaltation d�une ind�pendance courageuse, chez beaucoup d�auteurs de l�entre deux si�cles. Le th�me est ainsi d�velopp� par Alfieri dans son Del principe e delle lettere (1795), texte cher � Ch�nier dont Lionello Sozzi trouve �galement la trace chez Mme de Sta�l et Constant qui attribuent, comme Alfieri, l�autorit� de l�homme de lettres � sa d�fense de la culture et de la libert� face aux abus du pouvoir mais aussi � son r�le public et actif, � sa vigilance qui vise � montrer � chacun ses propres droits. Ils comparent ainsi le r�le de l�homme de lettres � celui d�un �  tribunal  �, image qui leur est ch�re. Mais si Alfieri, plus pessimiste, se r�fugie dans une ind�pendance solitaire sans croire au triomphe de la raison sur la force, les seconds travaillent � cr�er un consensus, � former le public en �vitant n�anmoins de tomber dans �  le despotisme d�opinion  �, autre forme du danger d�j� �voqu� par Voltaire dans sa d�finition, danger qui semblerait n�anmoins pouvoir �tre endigu� dans la conception lucide mais plus optimiste des auteurs de Coppet, au lendemain de la R�volution. C�est donc dans ce jeu intertextuel que se joue une nouvelle d�finition de l�autorit� de l�homme de lettres au tournant du si�cle. S�y donnent � lire une fois de plus non pas de brusques ruptures mais plut�t des r�manences et des nuances qui aident � mieux comprendre (et de mani�re pertinente) le cheminement difficile des id�es et des repr�sentations.

Le m�rite de cet ensemble est de nous montrer qu�un tel cheminement est tributaire d�une tradition bien plus tenace que de celle d�une simple �  Bastille  � � abattre, le pass� culturel �tant d�autant plus difficile � g�rer qu�il continue d�intervenir dans la recherche d�un nouvel �quilibre entre ordre et libert�.

Silvia Disegni

 

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