Aur�lie FOGLIA-LOISELEUR, L�harmonie selon Lamartine (dans sa po�sie �pique et lyrique, 1820-1869) utopie d�un lieu commun. Th�se de doctorat, sous la direction de Bertrand Mar�chal.

           Id�e re�ue dans la critique litt�raire : Lamartine compte au nombre des po�tes harmonieux. Mieux, il fait figure de r�f�rence, et cet adjectif semble sp�cifiquement attach� � son nom � la fa�on d�une �pith�te de nature, � l�harmonieux Lamartine�. Or notre recherche sur l�harmonie lamartinienne �tait d�autant plus risqu�e qu�elle s�attachait � un je ne sais quoi : il devenait �trangement facile de s�y perdre ou de rester fascin�. L�harmonie n�est-elle pas une violence insidieusement exerc�e contre la pens�e, celle que perp�tre de fa�on exemplaire la po�sie lamartinienne quand elle s��l�ve en toute suavit� ? � On trouvera toujours chez ce Rossini de la po�sie tout ce qui peut captiver ceux qui ne demandent qu�� s��blouir d�images et � s�enivrer d�harmonie, et nous avouons qu�il est bien difficile, dans l�enchantement qu�on �prouve, de d�sirer une po�sie plus intellectuelle et plus contemplative[1]. � Nous avions l�ambition de percer cet enchantement � sans toutefois vouloir, ni pouvoir, le dissiper compl�tement (notre t�che se trouvant facilit�e de beaucoup par le simple fait qu�il ne se produit, � l�oreille d�un lecteur moderne, qu�en de rares occasions.)

L�harmonie, m�taphore musicale, est un mot dangereux dont on a beaucoup abus�, Lamartine le premier, qui a port� la notion � son paroxysme et l�a mise quasi hors d�usage : apr�s la d�bauche qu�il a faite du mot, celui-ci veut � peu pr�s tout dire et ne dit plus grand chose. Maintenant que la notion para�t d�sactiv�e dans le champ des �tudes critiques, nous avons pu la reconsid�rer. Or nous avons r�cus� l�id�e d�une approche du vers qui aurait vis� sa formalisation : nous n�avons pas, � partir de la po�tique lamartinienne, produit un discours qui pourrait passer pour une science de cette musicalit�.

Plut�t que d�insuffler artificiellement � la notion d�harmonie po�tique un peu de ce savoir positif et de cette syst�maticit� que la musicologie lui accorde, nous avons accept� qu�elle soit, dans le champ des �tudes litt�raires, un outil critique aussi faible que banal : elle implique une relation affective au texte, une r�action spontan�e, alimentant un discours subjectif et impressionniste. C�est pourquoi nous avons d�plac� l�enjeu au niveau de la r�ception du texte po�tique. Nous avons voulu consid�rer la notion d�harmonie dans son historicit�. C��tait sans doute l�un des gages les plus convaincants d�une saine distance. Par exemple, nous avons pris le parti de valoriser la critique contemporaine de Lamartine : faute d�abord, disons-le, d�une bibliographie r�cente plus cons�quente sur le sujet ou sur l�auteur ; ensuite, parce que cette po�sie en harmonie avec la sensibilit� de son temps n�est compl�te que si elle trouve son �cho ; enfin, en raison de l�omnipr�sence alors du mot � harmonie �, h�rit� du classicisme, employ� sans scrupule pour porter des jugements de go�t sur les vers. C��tait l�occasion pour nous de faire r�entendre Lamartine. Il fallait donc � la fois le r�affirmer d�autant plus haut et plus fort qu�il �tait plus oubli� ou discr�dit�, et nous absenter. Amen�e � le relire (puisque tout discours critique fait un faux-bourdon par rapport au chant lyrique), nous avons tent�, autant que possible, de ne pas �mettre de jugements de valeur, mais d��laborer plut�t une po�tique de la valeur.

Notre approche historique se trouvait l�gitim�e en outre par le fait que l�harmonie doit �tre per�ue comme une notion anachronique : elle implique la n�cessit� de penser ensemble des domaines que la modernit� a s�par�s. Le refus de la syst�maticit�, consubstantiel � la notion, va de pair avec notre choix d�un plan chronologique. Tenter de penser l�harmonie, c�est aussi penser les articulations de son propre discours. Le probl�me pouvait se ramener � la question suivante : comment, � propos d�une notion aussi intrins�quement confuse, parvenir � un �nonc� suffisamment clair sans qu�il soit r�ducteur ? L�harmonie est une n�buleuse d�un point de vue s�mantique. Cette notion au spectre si consid�rable (harmonie du vers, harmonie physique et spirituelle, harmonie sociale, harmonie du monde�), proc�de � l�unification de domaines que nous ne pouvons pas isoler sans aussit�t la tronquer ; la musique, le moi et Dieu convergent et doivent �tre pens�s de concert. Po�sie, politique et m�taphysique se r�pondent.

Cette perte des rep�res et des fronti�res traditionnels nous a int�ress�e comme telle, si bien que nous avons essay� de la souligner plut�t que de l�effacer : elle constitue la qualit� et l�action vraiment sp�cifiques de l�harmonie. On pourrait aller jusqu�� dire que celle-ci ne se manifeste jamais si bien que par cette obstination � tout confondre. Aussi fallait-il tenir compte des imbrications, des chevauchements, des superpositions, bref de toutes ces jointures floues o� le sens circule et o� le travail d�unification appara�t � l��uvre. La vie de Lamartine s�offrait, de fa�on exemplaire, comme cette tentative, donnant en partie son cours au XIXe si�cle. Notre recherche sur l�harmonie a donc accompagn� cette qu�te de l�harmonie : ces deux projets se rejoignaient � l�infini - sachant qu�ils n�atteindraient jamais leur cible. 

Le rayonnement de la notion varie au cours du si�cle et dans la biographie lamartinienne. La premi�re p�riode que nous avons distingu�e correspond aux ann�es de formation - temps des � pr�m�ditations �, entre 1805 et 1819 - puis � l��mergence de la voix lyrique dans les M�ditations, en 1820, qui trouvent aussit�t un �cho � sympathique � dans la r�ception. Lamartine h�rite de la po�tique des Lumi�res un canon qu�il se contente d�appliquer, fid�le � une certaine id�e d�euphonie et d�eurythmie qui tient � l��ducation de son oreille. C�est pourquoi la r�volution � laquelle il proc�de ne rel�ve pas de l�insurrection formelle mais �largit et transforme de l�int�rieur les anciens lieux communs l�gu�s par la tradition rh�torique. � L�harmonieux Lamartine � respecte en apparence la norme po�tique et la subvertit en profondeur par sa facilit�, la singularit� de son chant, son ampleur syntaxique et strophique, sa � d�liaison �. Pour la critique contemporaine, cette po�sie est avant tout une musique � laquelle il manquerait les paroles tant sa fluidit� l�thargique fait �cran au sens. Le d�pouillement des th�mes, du lexique, si post-classique dans bien des tours et des emplois, tend � r�duire son discours � l�essentiel, l�exp�rience du temps pur � travers laquelle le sujet lyrique s��prouve lui-m�me.

Ce moment fondateur de l�int�riorit� renvoie � la constitution du moi comme une � �me � en r�sonance avec le monde et pr�dispose � l�interrogation m�taphysique � l�unisson avec les pr�occupations contemporaines. Car les prestiges sonores de ces vers seraient ludiques et vains s�ils n��taient, dans l�esprit de Chateaubriand, un instrument apolog�tique et un t�moignage suppl�mentaire du � g�nie du christianisme �. Cet enjeu, premier, tend � constituer le sujet lyrique lamartinien � l��cart des bruits de l�Histoire, alors qu�elle occupe l�avant-sc�ne dans nombre d�odes et d��l�gies contemporaines. Parce que le po�te � rend l��me �, � tous les sens du terme, l�harmonie lamartinienne commence par restaurer le silence. Une telle harmonie implique un rapport complexe au temps et un mouvement r�trospectif qui d�finissent le lyrisme lamartinien : elle est nostalgie du paradis perdu, � mal du ciel � - retour vers l�Eden, vers une enfance de l�art, des langues ou du moi.

Le texte lamartinien para�t collectivement partag� parce qu�il se propose comme le lieu et la langue du c�ur : centre aimant de la personne en correspondance avec autrui, mais aussi r�ceptacle de la nature et dimension privil�gi�e o� se noue la relation au divin. C�est pourquoi, alors m�me que les Harmonies po�tiques et religieuses, en 1830, se d�tachent du monde pour rencontrer Dieu, la pri�re a vocation de recr�er la communaut� des lecteurs � partir de l��nonciation m�me et des facult�s expansives du c�ur. Les Harmonies po�tiques et religieuses, en 1830, fondent une esth�tique de la r�ceptivit� qui invite chacun � s�exp�rimenter po�te.

Apr�s le recueil atemporel des Harmonies et un voyage en Orient qui joue le r�le d�une v�ritable travers�e du d�sert, Lamartine aborde la vie politique convaincu d��tre charg� d�une mission. Ainsi, il ne s�adresse plus seulement au lecteur � travers l�individualit� interchangeable du sujet lyrique mais par une parole collective suivant laquelle la po�sie accompagne l�action. Parce qu�il cherche � co�ncider avec l�image de � l�homme complet �, Lamartine proc�de � la destitution du po�tique : il n�en a pas la religion, si bien que le po�te doit mourir, non plus afin que sa voix s��l�ve plus pure, mais pour qu�elle s��l�ve dans une autre langue, � la tribune de l�orateur. L�harmonie trouve d�autres avatars que la musique du vers ; suivant sa logique unificatrice et ascensionnelle, elle se poursuit dans l�id�e de progr�s et donne lieu � une vision eschatologique de l�histoire, telle qu�elle organise la production �pique (Jocelyn, La Chute d�un ange) parall�le � l��uvre du d�put�. L�utopie du lieu commun a donc sa po�tique et sa politique, ins�parablement.

Ce � lyrisme politique � conna�t un double �chec. La Chute d�un Ange ne rencontre que l�incompr�hension et m�me les railleries du public. Lamartine subit une d�faite cuisante aux �lections pr�sidentielles en d�cembre 1848. L�ange tombe donc par deux fois. Ecras� de dettes, il tente sans succ�s de sauver en prose, si ce n�est son image, du moins sa fortune. Le lieu commun s�est perdu ; objet de foi, comme la notion d�harmonie dont il �mane, il n�a plus, litt�ralement, lieu d��tre. Le silence final de Lamartine, qu�il manifeste le mysticisme ou le d�sespoir, marque l��chec de ce r�ve dont il s��tait voulu le porte-parole. L�utopie personnelle et collective qu�a incarn�e son harmonie s��loigne dans le temps ; avec elle, l�image d�un ancien monde qui offre � la modernit� un nouveau mythe po�tique du paradis perdu.

[1]. Alexandre Vinet, Le Semeur VIII, 13 mai 1839, Lamartine et Hugo, Etudes sur la litt�rature fran�aise au XIXe si�cle,  p. 140. 

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